vendredi 17 juin 2011

[FESTIVAL DE CANNES 2011] The Tree Of Life

De Terrence Malick
Etats-Unis, 02h18
Avec Brad Pitt, Sean Penn, Jessica Chastain...

Et si la vie d'une famille était métaphoriquement comparable à la vie de l'univers même, avec ses moments formidables ou tragiques, ses naissances et ses morts, ses passages d'extrême douceur et d'extrême violence ? C'est en tout cas le parti pris choisi par Terrence Malick pour son nouveau poème cinématographie, sorti 12 ans après La Ligne Rouge, The Tree Of Life.

Ce film, cet ode à la vie, est en réalité découpé en quatre temps :
Le premier nous montre les protagonistes de cette famille des années 1950 qu'on ne connait pas encore dans des situations allégoriques parfois belles, mais parfois lourdingues aussi (comme cette courte séquence symbolisant la naissance où un jeune garçon sort d'une chambre d'enfant confortable submergée par l'eau en essayant de rejoindre la surface). Séquences accompagnés grâce à une sorte de montage parallèle, de plans montrant Sean Penn (dont on comprend vite qu'il est cet enfant devenu adulte) errant dans les bureaux modernes d'une de ces grandes villes à gratte-ciel américaine.
Tout ceci accompagné d'une voix off riche en phrases poétiques et en valeurs chrétiennes.

Le deuxième temps entreprend (rien de moins) de nous conter (sans parole) la naissance de l'univers du Big Bang jusqu’aux dinosaures en 45 minutes. Si cette séquence, accompagné d'une musique très religieuse est par moment belle, et surtout, est intéressante pour la comparer à la séquence de vie de famille qui suit (c'est tout l'enjeu du film), il est un peu déplaisant de voir qu'elle ressemble parfois plus à un reportage du CNRS sur l'espace ou à un documentaire d'ARTE (notamment pour le passage à la symbolique plutôt lourde à nouveau où un dinosaure (en image de synthèse pas très réussie) s'apprête à tuer et à manger un autre dinosaure blessé, mais ne fait rien finalement et retourne sur ses pas, comme victime d'empathie.

Le troisième temps par contre est tout à fait formidable et constitue le cœur du film. En s'obstinant le maximum d'éviter de mettre cette voix off moralisatrice assez insupportable de la première partie, Malick filme avec une apparente simplicité la vie de cette famille américaine banale, ni pauvre ni riche, du milieu des années 1950, tout en nous offrant une leçon de maître sur le naturalisme au cinéma. Car cette famille n'est jamais manichéenne : le père par exemple (Brad Pitt, encore une fois absolument fantastique dans ce rôle) est très autoritaire mais aime profondément ses enfants et ne se rend pas compte de la violence parfois de son comportement, car il sait aussi être très doux et aimant. Tandis que l'un des fils (dont le film fait le héros), victime du complexe d'œdipe est à la fois partagé entre la complète admiration pour son père, et sa volonté de le tuer.
Tout cela est montré avec un vrai réalisme si fort qui me pousse à dire que jamais on a parlé aussi justement d'une famille au cinéma.

Mais hélas, après cette longue et parfaite troisième partie, qui à elle seule fait que The Tree Of Life mérite cette Palme d'Or, viens une quatrième partie qui est une sorte de prolongement ultime (mais pas forcément nécessaire) de la première partie, une séquence symbolique de la mort où tous les personnages du présent comme du passé se retrouvent sur une plage, comme unis pour toujours au paradis, selon l'image d'Epinal de l'au-delà chrétien.

Car The Tree Of Life peut se voir ainsi : une réponse chrétienne au très nietzschéen 2001, l'Odyssée de l'Espace de Kubrick. Car l'un comme l'autre parle de la vie des hommes comparativement à la vie de l'univers, chacun donnant sa vision, selon ses croyances, de cette vie. De plus, dans 2001 comme dans The Tree Of Life, il y a une utilisation très grandiose de la musique, mais là où Kubrick utilisait des musiques profanes comme Ainsi Parlait Zarathoustra de Richard Strauss (qui renvoit bien sûr une fois de plus à Nietzche) ou encore Le Beau Danube Bleu de Johann Strauss fils, Malick utilise une série de musiques d'inspiration chrétienne. Mais hélas, Malick n'est pas Kubrick, et du point de vue de la mise en scène tout comme de l'écriture, il reste assez loin du Maître dont il avait voulu, à sa manière se rapprocher.

De plus, je pense que, comme disait justement Nietzsche de Pascal, c'est le trop fort caractère chrétien de son œuvre qui l'a un peu perdu.

jeudi 26 mai 2011

FESTIVAL DE CANNES 2011 - This Must Be The Place

De Paolo Sorrentino
Italie/Irlande/France,  01h58
Avec Sean Penn, Frances McDormand, Eve Hewson...

Cheyenne, ex-rockstar américaine au look gothique (qu'il continu à arborer à 50 ans, comme dernière et ultime marque de son passé dans la musique, lui qui ne chante plus) qui vit à Dublin repart aux état-unis pour retrouver le bourreau qui a torturé son père à Auschwitz.

Dernier long-metrage du réalisateur italien de Il Divo, prix du jury à Cannes en 2008, il est tout naturel que This Must Be The Place soit également à Cannes cette année. Car ce film est véritablement né à Cannes : lorsque Sorrentino reçoit en 2008 le prix du jury des mains de Sean Penn (alors président du jury), Sean Penn lui confie qu'il rêverait de tourner avec lui. 2 ans plus tard, Sorrentino revient à Cannes avec un film dans lequel on trouve Sean Penn dans le rôle principal.

Et quel rôle ! Sean Penn est totalement méconnaissable sous les traits de Cheyenne, cette gothic-star faisant diablement pensé au chanteur de Cure, Robert Smith. Et ce n'est pas uniquement le maquillage qui fait ça, car Sean Penn est totalement transformé dans sa voix et ses gestes, à la manière d'un Johnny Depp, et nous à ainsi offert une performance d'acteur digne d'un prix d’interprétation, si la concurrence n'était pas si dure cette année là.

Outre la remarquable prestation de Sean Penn, le film est également fabuleux par sa mise en scène sublime, rappelant The Big Fish de Tim Burton ou certains films des frères Cohen. Sans jamais être pathétique, ce road-movie très drôle nous fait suivre ce personnage si riche qu'est Cheyenne, sa rencontre très brève avec de nombreuses situations et de nombreux personnages esouvent allegoriques et toujours très travaillé, à travers les magnifiques paysages du sud-ouest des états-unis.

Un très bon film donc, sublimé par une mise en scène grandiose, une image proche de celle du The Big Fish, et une direction d'acteur digne des frères Cohen font de ce film mon coup de cœur de ce 64ème festival de Cannes.

mercredi 16 mars 2011

Le Discours d'un Roi

De Tom Hooper
Royaume-Uni,  01h58
Avec Colin Firth, Geoffrey Rush, Helena Bonham Carter...

Le discours d'un Roi, c'est l'histoire d'un monarque méconnu, George VI, Roi de Grande Bretagne et de l'Empire Britannique de 1936 à 1952 qui dut faire le discours radio annonçant au peuple qu'une nouvelle fois, l'Angleterre entre en guerre.
Seulement voilà, George VI est victime d'un terrible bégaiement...
Ce synopsis vous le connaissez tous, tant ce film à fait parler de lui.
Et à raison ! Tout d'abord, par cette magnifique performance d'acteur de Colin Firth qui lui valut un Oscar amplement mérité. En effet, traditionnelement au cinéma, le begayement est traité de façon comique, or c'est quelque chose dans la réalité qui n'a vraiment rien de drôle, bien au contraire. Et c'est à travers un jeu quasi naturaliste que Colin Firth devient le meconnu George VI. On ne ris pas avec lui, mais on souffre avec lui.
D'autre part, bien que ce film repose essentielement sur la performance de Colin Firth, il ne faudrait pas oublier les autres aspects de films. Concernant les acteurs, Geoffrey Rush en ortophoniste aux methodes revolutionnaires est également très impressionnant, et Helena Bonham Carter joue très bien, mais plus fidèle à ses habitudes de jeu.
Le film est traité à travers une mise en scène très sobre, mais néanmoins très juste en évitant les complications scenaristique qui sont pourtant hélas à la mode pour nous livrer une histoire dans laquelle on entre aisément et totalement, si bien que l'on est surpris lorsque l'on découvre que Colin Firth et Geoffrey Rush ne sont finalement que des acteurs

samedi 22 janvier 2011

We Are Four Lions

De Chris Morris
Royaume-Uni, 01h41
Avec Riz Ahmed, Arsher Ali, Nigel Lindsay...
Sortie le 8 décembre 2010

La grande peur de notre époque est certainement celle-là : la peur de la menace terroriste. Combien de fois des gares ont-elles été bloque pour cause de (fausse) alerte à la bombe ? Combien de sacs fouillés à l'entrée des théâtres ou des médiatique ? Oui, la France à peur, comme disait Roger Gicquel dans les années 1980. Et pas que la France, tout le monde occidental vit dans le frisson constant d'une éventuelle attaque.
Parler de terrorisme au cinéma est une chose difficile, peu de réalisateur osent s'y attaquer, alors envisager le terrorisme d'un point de vue comique, c'est de l'ordre de l'impensable ! Pourtant Chris Morris, ex-animateur satirique de télé, la fait. Il fallait être anglais pour oser ça, et c'est donc dans la fière veine montypythonesque que Morris voit la chose. We Are Four Lions est donc un vrai film anglais, au sens le plus noble du terme. Les gags sont de tout niveau, il y a du premier degré brut et du plus subtil, mais c'est globalement très drôle, du moment qu'on aime l'humour absurde et un brin provocateur dont en ont l'art ces chers anglais.
L'idée est donc, quoi qu'en dise ses détracteur, attaché au politiquement correct comme à une corde de survie, terriblement génial de part son original, mais aussi car elle bouscule les mentalité quand à la peur du terrorisme. Les dialogues et les situations comiques, sans être révolutionnaire ou vraiment mémorables sont assez sympathiques, on ne s'ennuie pas et on rit même beaucoup, mais c'est vrai que ça n'a pas la force d'un Monty Python (à nuancer tout de même : certains passage, comme la scène d'ouverture où ces terroristes de pacotille font une vidéo de menace type Al-Quaida, ou certains autres passages sont vraiment désopilants)
La où le film pêche un peu toutefois, c'est dans la photographie : dans la veine de cette (insupportable) nouvelle mode, ça se veut "documentaire" (ou reportage plutôt). Certes, le côté "image brut", sans grand étalonnage est vraiment intéressant. Mais par contre, la caméra ne cesse de zoomer, de dézoomer, et de se déplacer dans tous les sens sans raison. On a très vite la nausé, d'autant qu'on ne comprend pas l'intérêt, puisque la caméra n'est pas dans ce film un personnage (comme elle l'est dans Le Projet Blair Witch ou dans Cloverfield). D'accord un pied ça coûte cher, mais quand même.
Bref, un très bon film, un vrai divertissement intellectuel, car il ne nous détache pas de la réalité, mais qui aurait mérité vraiment un meilleur traitement

mercredi 5 janvier 2011

[SPECTACLE] Les Predateurs

De Patrick Chevalier et Ismaïl Safwan, France, 2010
Compagnie de l'Ange d'Or
Mise en Scène : Ismaïl Safwan
Avec Patrick Chevalier
Vu au Théâtre Jeune Public à Strasbourg le 7/12/2010.

Les Prédateurs est un spectacle sur la crise des Subprimes aux états-unis et ses conséquences. Etrange sujet me direz-vous pour un théâtre dit "Jeune Public". Et bien oui, étrange sujet. On comprend assez mal pourquoi c'est le TJP qui a subventionné cette "création original" déjà difficile a comprendre pour des adultes murs et aptes à comprendre les méandres de l'économie mondiale. Alors, vraiment on ne comprend pas. Pauvres enfants qui doivent se farcir cet ersatz de pièce de théâtre ressemblant hélas trop souvent à un cours magistral qu'à un vrai spectacle.
Car le problème est bien là : Les Predateurs, sorte de Wall Street II théâtral, les scènes d'action, les histoires d'amours, et le scenario en moins, manque de spectaculaire. Il y a bien le jeu de différents personnages par Patrick Chevalier, parfois intéressants, c'est vrai, pour peu qu'on s'y connaisse un peu - beaucoup - en économie (regardez sur Wikipédia pour ceux qui ne les connaissent pas qui sont Milton Freakman et Jean-Marie Messier - entre autres - vous rirez plus à cet humour ultra-sophistiqué). Humour ultra-sophistiqué qui tranche avec le burlesque lourdingue du deuxième tableau. Mais ce tableau, ce "moment", à au moins le mérite d'être le seul qui s'autorise un peu de fantaisie, dont un passage musical avec une formule mathématique, passage très beau est très drôle, surement le meilleur moment de la pièce.
Mais le problème, c'est que durant les trois quarts de la pièce, Chevalier joue le rôle d'un économiste libéral qui nous donne une sorte de cours plus ou moins ironique sur le fonctionnement sur le fonctionnement général des système de prêts des banques américaines à l'origine de la crise. Cela aurait pu être interessant, si les auteurs de ce texte barbare ne s'étaient pas amusé à chercher les termes les plus complexes dans des dictionnaires de l'économie mondiale afin de nous aussi compréhensible qu'un cours sur les systèmes économique sur la Wikiversité.

J'ai écrit la première partie de cet article qui ressemble plus à une diatribe qu'a une critique le lendemain de la représentation. Aujourd'hui, presque un mois après avoir vu la pièce, aussi surprenant que ce soit, j'ai une meilleure image de ce spectacle. Il m'a permit en effet de comprendre quelques éléments sur l'économie.
Néanmoins, il est assez clair que je me suis plus qu'ennuyé pendant la représentation, mais c'est une pièce à vocation pedagogique (c'est un peu dommage, d'ailleurs, de prendre les spectateurs pour des "élèves") qui ne s'apprecie pas dans l'instant, mais que l'on garde malgrès tout dans notre mémoire.
Dommage toutefois que l'acteur, unique, ne soit clairement pas assez bon pour faire bien vivre ce stand alone. Il est emprisonné dans un type de jeu très lassant et ne semble pas vouloir oser des choses plus éclectique ou, n'ayons pas peur du mot, fantaisiste. Un peu de fantaisie de ferait vraiment pas de mal dans cette pièce globalement tristement sérieuse.

dimanche 28 novembre 2010

Harry Potter et les Reliques de la Mort - Première Partie

De David Yates, États-Unis, 02h25
Avec Daniel Radcliffe, Rupert Grint, Emma Watson...
Sortie le 24 Novembre 2010


Et de sept ! On commence à voir la fin de cette licence certainement la plus populaire de ces dernières années - enfin presque, car afin de prolongé le mercantilisme de tel produit, il fallait bien le rallonger : c'est pourquoi la production a sans vergogne séparé ce dernier tome en deux opus. Pour le meilleur ou pour le pire ?
Rassurez-vous : les fans du sorcier qui fait plus vieux que sont age seront ravis, et les moins fans peut-être aussi. Pour une fois, on peut dire que David Yates à fait du bon boulot. Car après avoir massacré le sixième épisode en en faisant une sorte de teenage-movie sauce Twilight absolument incompréhensible point de vue rebondissements pour un spectateur qui n'aurait pas lu le roman au préalable, le réalisateur nous "offre" là un épisode bien plus "sombre" que les précédents, assez proche dans la forme du troisième épisode (réalisé par Alfonso Cuaron), le ton bleuté caractéristique de Yates dans les Harry Potter en plus. On est très loin du coté très féériques des films de Chris Columbus (les deux premiers) qui apportais toutefois un cachet assez sympatique à la série, même s'il est logique que la serie gagne de la maturité en même temps que ses personnages. Un épisode plus sérieux donc, même si les histoires d'amour sont assez présentes (Yates n'a pas pu s'en empecher), l'histoire l'emporte tout de même cette fois-ci sur le mélodrame (enfin plus ou moins)
De plus, les fervants lecteurs de Rowling seront heureux, puisque cette épisode n'"oublie" pas trop de péripéties (ce qui est quand même frustrant) - grâce, il faut bien le reconnaitre, au decoupage en deux de l'opus.
Quelques idées, assombrissant l'ambiance, sont assez bienvenu, à l'instar de la métaphore entre le Ministère de La Magie devenu Mangemort, et le régime Nazi (c'est assez clair : on y voit une une statue au style très IIIème Reich montrant des sorciers "de sang pur" écrasants des moldus... Ce n'est pas sans nous rappeler des heures sombre ; de plus Yates insiste bien histoire qu'on ai tous bien compris, en nous montrant des sortes de gardes de sécurité portant bien en évidence au bras droit un brassard rouge assez équivoque).
D'autre part, certains passages de pure action sont assez sympathique, à l'instarde cette course-poursuite dans le Londres moderne, même si on peut trouver quelques longueurs dans le films et quelques passages moins réussit (comme la séquence dans le petit village anglais le soir de noël, qui est assez bâclée)
Mais il y a toutefois un passage que je trouve absolument hors-propos : la séquence en animation. Partant d'une idée faussement originale (c'était en réalité la seule solution trouvé pour illustrer le conte raconté par Hermione), Yates (ou la Warner, je ne sais pas qui eu l'initiative) nous livre un dessin animé pas mal réalisé, mais dans un style manga à l'américaine à l'opposée totale du style du texte et de l'ambiance générale de la série (très "vieille Angleterre)
Bref, un bon divertissement pas exempt de défaut, qui faute de faire aussi bien que les 3 premiers, fait beaucoup mieux que le précédant, permettant à Yates de rattraper son erreur tout en rendant heureux les amateurs du genre et les fans de la série.  

dimanche 21 novembre 2010

Buried

De Rodrigo Cortés,
Espagne, 01h35
Avec Ryan Reynolds, Robert Paterson, José Luis Garcia Pérez...
Sortie le 3 Novembre 2010

Il existe deux sortes de très bons films : les très bons films à univers, qui développent tout un imaginaire qui nous emporte et dont on rêvasse encore dessus bien après avoir vu le film (comme Le Seigneur des Anneaux) et les films chocs, qui nous font l'effet d'une claque, et dont on ressort de la salle, l'esprit encore embrumé par ce que l'ont vient de voir. Des films qui nous changent, qui nous transforment, qui nous marquent. Buried fait partie de cette deuxième catégorie.
Bien sûr, le film ultra-claustrophobique de Rodrigo Cortés, qui appartient très certainement à ce nouveau cinéma espagnol d'influence certes américaine mais qui révolutionne le genre du film d'angoisse - à l'instar de L'orphelinat - n'est pas exempt de défauts : on peut y voir, en cherchant bien, quelques invraisemblances - et encore, cela se discute - ou que l'action n'est parfois qu'une succession d'évènement qui ne dépendent pas des autres (mais c'est rarement le cas), mais qu'importe, car Buried nous plonge dans une telle angoisse, nous prend à la gorge, littéralement.
Tout d'abord car tout le film se déroule dans ce minuscule cercueil où l'on ne peut que se tenir couché (c'est un cercueil de taille standard). Même les moins claustrophobes se sentirons mal à l'aise, car le film est si prenant qu'on a l'impression d'y être, nous aussi, dans ce cercueil.   
Le héros, Paul, camionneur civil sous contrat avec l'armée envoyé en Irak se réveille enfermé dans cette boite. Avec lui, simplement un Zippo, un téléphone portable en arabe à demi rechargé, et 90 minutes d'oxygène.
Comment va-t-il faire pour s'en sortir ? Et surtout, comment le réalisateur va-t-il faire pour rendre ce film d'une heure trente-cinq intéressant ?
Et bien, tout d'abord, d'un point de vue formel, Rodrigo Cortés use de "points de vues impossibles" mais néanmoins très intéressants et qui ne perturbes pour autant pas du tout le réalisme du récit et qui sont parfois simplement nécessaires, parfois une vraie volonté esthétique.
D'autre part, du point du vue du récit, il se passe constamment quelque chose, ce qui fait comme je l'ai dis, que l'on est constamment tenu en halène. Le téléphone portable bien entendu, puisque qu'il permet de communiquer avec l'extérieur, permet la plus part des actions - certains diront qu'il y a là de la facilité scenaristique - il n'est plus vraiment "tout seul" du coup - pour ma part je ne lui en tiendrai pas rigueur : ça permet également de se poser d'autres questions bien stressantes (Qui est à l'autre bout du fil ? Ou est cette personne ? Etc.)
Un très bon premier film donc pour Rodrigo Cortés (qui a toute l'originalité et la force des premiers films - espérons que comme beaucoup il ne se "standardise" pas trop par la suite, victime de son succès et des majors), ainsi qu'un rôle vraiment mémorable pour Ryan Reynolds, acteur de series et personnage secondaires de films assez inégaux (Mi$e à prix; La proposition; X-men Origins : Wolverine; etc.)
Un film qui marquera aussi les esprits, car même si la thématique de l'enterrement vivant à déjà été abordés plusieurs fois dans des films le temps d'une séquence (Kill Bill vol. II), mais jamais pendant 1h35 sans jamais nous montrer l'extérieur, et ce tout en faisant un film riche en rebondissements. C'est très fort.

dimanche 14 novembre 2010

The Social Network

De David Fincher, Etats-Unis, 02h00
Avec Jesse Eisenberg, Justin Timberlake, Andrew Garfield... 
Sortie le 13 Octobre 2010

L'histoire, on la connais presque tous tant le film à fait parler de lui ces derniers temps : celle de la création du gigantesque réseau social (social network) Facebook, vu à travers son créateur, le charismatique nerd, Mark Zuckerberg, joué ici par un habitué de ce genre de rôle (Bienvenue à Zombieland, Adventureland,..) : Jesse Eisenberg, qui tient là très certainement le plus grand rôle de sa vie, du moins à l'heure actuelle. Car tout le film tourne autour de ce personnage de Mark Zuckerberg, véritable Citizen Kane de l'ère geek, et de toute l'histoire du terrifiant  et génial site internet qu'il conçoit, de Facemash - site internet créé en une soirée par un Zuckerberg saoul et fraîchement célibataire afin de voter pour la fille la plus belle du campus (toute la puissance nerd - et le cliché peut-être aussi - de ce brillant mais introverti étudiant d'Harvard est là) - à Facebook, la plus grande communauté du Monde, tout cela à travers 3 procès parmi de nombreux autres dont fut inculpé Zuckerberg (tout cela relaté dans un montage alterné passé/présent très intéressant). Mais alors, Mark Zuckerberg, gentil ou méchant ? Voyou, génie ou traître ? Les trois peut-être, mais surtout milliardaire, comme le précisait une des deux affiches - qui sont géniales de sobriété et de force : un gros plan sur le visage d' Eisenberg/Zuckerberg placardé des mots voyou - génie - traître - milliardaire). Au fond, c'est certainement au spectateur de se faire une opinion sur Zuckerberg : le personnage n'est pas manichéen, il fait beaucoup de coups bas et se comporte parfois en vrai salaud, mais au fond, il semble aussi un peu victime du système qu'il a créé et qu'il ne contrôle plus tout à fait.
Mais ce film peut-il avoir un attrait pour les néophytes totaux de Facebook ? Tout à fait, car c'est avant tout une fresque géniale qui dépeint toute une époque, et parle d'autre que de Facebook, comme le fonctionnement d'une grande université américaine et ses club pour étudiants, le bizutage, etc.
De plus, Fincher ne parle pas ou très peu du fonctionnement même de Facebook. Ceux qui savent tant mieux, pour les autres ce n'est pas grave : ça n'apporte rien de plus au récit.
A travers ce film qui est plus qu'un simple biopic, Fincher réussit l'exploit de nous parler de quelque chose d'à priori aussi cinématographiquement barbant que la naissance de Facebook d'une façon totalement captivant à travers une mise en scène qui fascine où les dialogues sont omniprésents : dès la première séquence le ton est donné : champs/contre-champs extrêmement rapide, dans lequel on ne nous explique pas de quoi il est question, ce qui fait qu'on met un certain temps à comprendre qui ils sont (En l'occurrence Zuckerberg et sa - future - ex-petite amie) ni de quoi il parlent. Il fallait le faire, ouvrir un film comme ça. Et pourtant c'est génial, et ça installe tout de suite une certaine ambiance.
On pourrait peut-être simplement reprocher à Fincher de ne pas parler de ce que représente Facebook dans la société actuelle - à la fin du film, on a qu'une seule envie, c'est d'aller s'inscrire !
Mais le but de Fincher n'était pas là : on en voit  tout le temps des articles dans les journaux qui critiques Facebook et sa dictature. Mais ce n'est pas un film sur le Facebook d'aujourd'hui. C'est un film sur sa création et surtout sur le personnage de Mark Zuckerberg.

lundi 1 novembre 2010

La Menzogna (SPECTACLE)

De Pippo Delbono, Italie, 2008
Mise en scène : Pippo Delbono
Avec Pippo Delbono ; Dolly Albertin ; Gianlucca Ballaré ...
Vu au MAILLON à Strasbourg, le 15/10/2010

Avant d'essayer de s'aventurer dans une impossible "critique" de cette pièce, il faut d'abord situer l'énigmatique œuvre :  En 2007, 7 ouvriers meurent dans l'usine ThyssenKrupp de Turin. Mario Martone, directeur du Theatro Stabile de Turin propose à Pippo Delbono de faire l'ouverture de la saison du théâtre avec une pièce autours de cette affaire.
Pour écrire cette pièce, Delbono se rend à l'usine ThyssenKrupp. Et là, il est choqué par les conditions de travails qui, dit-il (dans une interview réalisé lors du festival d'Avignon) relève d'un autre age.
Mais comment alors réaliser un pièce qui témoignerais de la situation de ces ouvriers avec force et vérité.
On le voit bien au regard de la pièce, qu'il n'a pas choisi - et c'est tant mieux - la voie du réalisme. Le spectacle est sans dialogues ou presque. Les rares apparitions de mots proviennent de tirades issus d'autres pièce (comme un extrait de Roméo Et Juliette de Shakespeare. Sinon ce sont des cris. De terribles cris machiaveliques qui participent à mettre en place une ambience plus que malsaine. Car Delbono joue de la provocation : des multiples corps nus sur scène, une armada de curés enferments des jeunes filles dans des casiers (!), un Pippo Delbonno en chef d'orchestre fou et tyranique s'amusant en photographiant le public, etc.   
Et au milieu de cette superbe et terrible folie, un faux entracte, une pause pour le moins étrange où on interdit au spectateur de sortir de la salle, où Pippo Delbonno rentre parmis eux et avec un micro soliloque, parle de choses qui ont plus ou moins quelque chose à voir avec la pièce, comme il l'a fait au debut de la pièce (ou bien était-ce juste avant qu'elle ne commence ?) quand, assis dans le public, inconnu, il commence à parler au micro dans un français très italien de la politique de Sarkozy et de sa femme.
Tout cela pendant qu'un homme sur scène se promène nu, imitant un chat.
Oui, c'est une pièce vraiment étrange, mais qui parradoxalement nous captive. On y comprend rien, on trouve ça souvent odieux - c'est voulu, mais on ne ferme pas les yeux une seconde.
Et c'est ça que veut montrer aussi, je pense, Delbonno : notre réaction face à des images, des actions, des corps qu'on a pas l'habitude de voir ainsi. Avec la publicité, Internet, le cinéma de masse, mais aussi un certain théâtre, nous sommes submerger d'images, et montrer sur scène des corps nus n'a pas la même impact qu'il aurait eu sur nous il y a 40 ans.
Pourtant la mise en scène de cette mensogna, ce "mensonge", qui nous montre d'ailleurs aussi des extraits vidéos, notamment d'une publicité pour ThyssenKrupp suivi d'un message critique d'un homme d'église italien, est un vrai claque. Une explosion dont on reste marqué à jamais. Enfin un théâtre qui se réinvente ! Enfin un théâtre qui nous permet de prendre conscience d'une certaine réalité. Enfin un théâtre qui ne se veut pas une représentation réaliste de la réalité, mais qui pourtant nous parle bien plus du réel que n'importe quel reportage aussi "choc" soit-il sur ce sujet. Bravo.

lundi 25 octobre 2010

Chaque jour est une fête (FESTIVAL CINEMED 2010)

De Dima El-Horr, France/Allemagne/Liban, 1h25
Avec Hiam Abbas, Manal Kader, Raïa Haïdar...
Sortie le 27 Janvier 2010
Projeté au 32ème CINEMED de Montpellier (Fin Octobre 2010) 

A Beyrouth, de nos jours, un groupe de femmes qui ne se connaissent pas prennent le bus à travers l'arrière-pays libanais pour aller dans une prison pour hommes où elles ont, pour des raisons différentes, chacune des visites à passer.
Mais lors du voyage, au millieu de cette terre aride, le chauffeur meurt d'une balle dans la tête qui provient d'on ne sais où...
Les femmes sont livrés à elles-mêmes, le groupe se sépare peu à peu, et c'est finalement 3 femmes, d'horizons divers mais liées malgré elles par le destin, sur lesquelles le film s'attarde.  
A travers un road-movie fascinant, dans laquelle les actions et les évènements se succède un après l'autre (ce qui nous offre un veritable fil d'Ariane qui empêche le spectateur de se perdre et donc de s'ennuyer comme c'est hélas souvent le cas dans ce genre de film politique), Dima El-Horr nous montre la guerre civile qui ne s'est jamais vraiment finie au Liban sans jamais la filmer : à travers des sons diègetiques off, des populations en fuite, des echos d'"opérations", et de villages brulée, elle construit un important hors-champs, tout un contexte, qu'elle n'explique pas, mais c'est inutile, puisque c'est un état de fait.
L'idée de road-movie, peu habituelle dans un film lourd comme Chaque jour est une fête est formidable, car on s'interresse ainsi bien plus facilement à l'aventure des personnages, mais on s'attache aussi beaucoup à eux. Enfin à elles, puisqu'il s'agit de femmes parties pour voir le mari ou leur ex-mari, gardien ou prisonnier, mais finalement c'est leur propre indépendance qu'elles vont trouver à travers ce périple qui est un véritable voyage initiatique parsemé d'embuches qui une à une traversée rendent plus fort.
Toutefois, on pourrait reprocher au film sa grande lenteur, présente comme pour précisé inutilement qu'il s'agit d'un film d'art et essai independant du Sud, un genre qui commence helas à se codifier... Et même si le scenario et le type de point de vue est quand à lui original, le rythme de la mise en scene (qui pourtant ose quelques plans très intéressants comme ce long travelling arrière au debut puis avant à la fin du film qui passe du plan général au très gros plan en une quinzaine de seconde) est des plus classiques pour le genre.
Quoi qu'il en soit, et c'est l'essentiel, Chaque jour est une fête est un de ces film dont on ne ressort pas indemne, conscient d'avoir vécu un grand moment de cinéma et une grande aventure humaine.

dimanche 3 octobre 2010

Wall Street, l'argent ne dort jamais



De Oliver Stone, Etats-Unis, 2h16
Avec Michael Douglas, Shia LaBoeuf...
Sortie le 29 Septembre 2010

Plus de 20 ans après le premier, Oliver Stone offre une suite à son Wall Street. C'est l'histoire, sous fond de crise des subprimes (2008), d'un Gordon Gekko sortant de prison après 20 ans pour délit d'initié. Il rencontre un jeune trader, Jacob Moore (Shia LaBoeuf) qui veut se marier avec sa fille. Les deux hommes font un marché (un "deal") : Moore veut venger son ancien mentor, victime de magnats de la finance, Gekko veut se réconcilier avec sa fille. Mais Joseph Moore apprendra à ses dépends qu'on ne passe pas de marché d'entraide amiable et équitable avec Gordon Gekko...
Ce nouveau Wall Street n'est pas un mauvais film. D'abord, nous avons le droit à de très beau rôles (si Michael Douglas reste fidèle à lui même et excelle dans ce rôle de financier à double face, Shia Laboeuf est également très bon, et tient sûrement le meilleur rôle de sa carrière à l'heure d'aujourd'hui), mais aussi à de très bon personnages : Joseph Moore est l"archétype sans être le cliché du jeune trader dans le vent et propre sur lui, façon Jérôme Kerviel, tandis que Gekko est le parfait financier véreux, adepte de gros cigares, mais qui pour autant ne laisse rien transparaître.
Tout cela, ainsi que la représentation de cet univers très fermé de la finance mondiale est parfaite. La preuve en est d'une très bonne étude documentaire d'Oliver Stone sur le sujet.
Là où le film néanmoins déçoit, c'est qu'on ne sait jamais s'il on a à faire à un film très grand public, ou à une réflexion pointue sur le domaine de la finance lors du krach de 2008. Car Oliver Stone alterne avec maladresse montage ultra-rythmé et fantaisiste (surtout lors des transitions, ce qui lui apporte un aspect "pub" pas vraiment bienvenu) ainsi que scénario très convenu (les difficultés de la vie de couple, et les problèmes familiaux père/fille, traités de plus d'une manière archi classique, déjà trop souvent vu et revu par le cinéma américain) avec discours très complexe sur les flux et reflux du monde de la finance d'une très grande perméabilité pour les non initiés.
Bref, ne sachant jamais dans quel registre jouer, le film d'Oliver Stone perd beaucoup de sa force. Dommage, c'était à moitié réussi.

samedi 25 septembre 2010

Des hommes et des dieux


De Xavier Beauvois, France, 2h00
Avec Lambert Wilson, Michael Lonsdale...
Sorti le 8 Septembre 2010

Le synopsis est simple, mais terrible : c'est l'histoire vraie de la vie des moine d'un monastère dans les montagnes maghrébines quelques mois avant leur assassina par des extrémistes islamistes.
Le fait divers à beau être tragique, il en reste néanmoins difficile d'en faire un film : personne en effet ne sait réellement comment ces moines ont été enlevés et exécutes.
Qu'importe, l'essentiel n'est pas là, et ça Xavier Beauvois l'a bien compris : avec ses personnages jamais manichéens, toujours très bien joué, mais aussi profondément réalistes, il nous livre une belle leçon d'humilité, de fraternité oecuménique.
Les moines de Xavier Beauvois sont aussi et avant tout des hommes, tout comme la population locale avec laquelle ils partagent beaucoup, et même comme les islamistes. Là aussi est la force du film. Sa profonde humanité.
La mise en scène quand à elle est très académique. Bien entendu, la force du film n'est pas là. Quelques exceptions tout de même : l'usage très maîtrisé de la musique, ainsi que la scène du dernier repas, clin d'oeil évident à la "Cène", très bien réussie.
Un très bon Grand Prix de la cuvée Cannes 2010 !
5